lundi 31 mai 2010

La délinquance et le capitalisme

Je ne peux m’empêcher de réagir à l’article de Xavier Raufer intitulé « la crise, le crime et les fausses excuses » dans Le Figaro du 25 mai 2010.
Voilà ce qu’il nous dit en substance.

« La cause est entendue. Depuis un demi-siècle de Foucault en Bourdieu, tous les mandarins de la gauche académique le rabâchent sur tous les tons : la violence, le crime n’ont qu’une indiscutable origine et une seule, la misère sociale. Dans la maléfique société actuelle, disent ces philosophes révoltés et ‘sociologues critiques’, les misérables, les déshérités, les marginaux sont implacablement poussés vers la déviance, le crime. Ont-ils le choix ? Non ! assènent ces gourous, c’est la logique même du système capitaliste et de ce fait un lien direct, de cause à effet existe entre misère sociale et crime (…) Ce vieux poncif hugolien travesti en vérité scientifique porte un nom : la ‘culture de l’excuse’. Une ‘culture’ dont hélas ! les médias se font souvent l’écho, par réflexe grégaire ou sympathie naÏve …..

Et Xavier Raufer de nous donner des chiffres…

« En Grande Bretagne, pays d’Europe violemment atteint par la crise (…) le total de toutes les infractions constatées ou relatées par sondage : - 7% en 2009 (…) Aux Etats-Unis, l’effondrement du crime est plus énorme encore – un pays qui compte 7 millions de chômeurs de plus, sans indemnités sérieuses ni vraie couverture sociale, où des dizaines de milliers de familles ont été chassées de leur maison. Or, à New York, les homicides (-19% en 2009) sont au plus bas depuis…1964 ».

Et de conclure :

« De tels chiffres révèlent combien la misérabiliste ‘culture de l’excuse’ est matériellement contredite par les faits. Non, les crises (financières ou économiques puis sociales) ne déclenchent pas d’explosion criminelle. Non, la misère sociale en tant que telle ne suscite pas le crime. »

Nous pouvons déjà remarquer qu’aucun chiffre français n’est cité, ensuite que Xavier Raufer fait l’amalgame entre crime et délinquance alors qu’il peut y avoir délinquance sans crime. Cette analyse est doublement fallacieuse : d’abord parce qu’elle ne fait pas état de la forte augmentation des moyens employés en hommes et en technique pour combattre la délinquance – ce dont ne peut que se réjouir – mais plus grave encore, parce qu’elle laisse penser que la délinquance n’a rien à voir avec le chômage et la misère dans les banlieues. A qui peut-on faire croire çà ? Il est vrai que le phénomène de la délinquance est lié à la nature et au vécu de chacun quelles que soient son origine, ses croyances, son éducation, sa fonction, le lieu où il habite – la délinquance en col blanc est bien connue… - mais une personne tombera d’autant plus dans la délinquance si la frustration – de quelque ordre qu’elle soit – est plus grande et mal vécue ; et la pauvreté fait grandir cette frustration ; si l’on y rajoute une couche de méprisvoire de racisme, la frustration de ne pas être reconnu est d’autant plus grande, peut devenir humiliation et laisse la porte ouverte à toutes les déviances : alors, les valeurs et l’éducation sont de maigres remparts. Le capitalisme, dont l’arme principale est de créer des frustrations et souvent de faux besoins pour mieux vendre, est d’autant plus responsable de cette situation.
L’enseignement que nous pouvons en retirer est que toutes ces informations de mauvaise foi qui tendent à crédibiliser le capitalisme tel qu’il est vécu aujourd’hui ne doit pas nous détourner de notre but, celui de le refonder pour éradiquer la pauvreté et par là-même la délinquance voire le terrorisme dans le monde.





mardi 25 mai 2010

Les jeux d'argent ou «l'école» du capitalisme


Autant nos gouvernants oeuvrent pour lutter contre l'addiction à l'alcool, au tabac, à la drogue qui fait des dégâts énormes sur le plan personnel, familial et sociétal, autant ces mêmes gouvernants sont très laxistes sur l'addiction aux jeux d'argent, pire, les encouragent (Loto, PMU, Euromillions, Keno, cartes à gratter en tous genres... et régulièrement la Française des Jeux nous en invente de nouveaux). Pourtant, l'addiction aux jeux d'argent est un fléau aux conséquences souvent très graves qui touche principalement les plus pauvres chez qui la tentation est grande de «se refaire» par le jeu.
On serait donc en droit de penser que l'Etat limite ces jeux d'argent ou tout au moins n’en fasse pas la promotion ! Au contraire, dernièrement, le Conseil Constitutionnel a donné son feu vert à la concurrence des jeux de paris en ligne et le gouvernement entend ouvrir cette concurrence avant le début de la coupe du monde de football en juin 2010. On n’ a jamais tant vu de publicité et par là-même d'intérêt de la part du public pour les jeux d'argent. Toutes les chaînes de télévision ont un programme de jeux où l'on peut gagner de l'argent, sans parler des propositions et facilités dans le genre qu’on trouve sur Internet... Les chiffres parlent d'eux-mêmes : les statistiques nous disent que trois français sur cinq jouent et qu'en 2009 ils ont laissé chaque jour la somme record de 60 millions d’euros dans les caisses de la Française des jeux, du PMU et des casinos, soit l’équivalent d’un Airbus A320 ou de deux lycées en Ile de France ; selon l’AFP (Agence France-Presse), en sept ans les dépenses quotidiennes des français dans les jeux d’argent sont passées de 47,5 à 60 millions d'euros malgré la crise économique. Ce qui fait un total de 22 milliards d’euros par an - de quoi réduire pour un an la moitié de la pauvreté et de la malnutrition dans le monde ! Comme on le voit, d’année en année, ce chiffre est en forte progression. Il a même été question que des hypermarchés puissent vendre des jeux à gratter et ce n'est que sur la pression des buralistes – qui craignaient de voir ainsi disparaître une partie de leur recette – que la chose ne s'est pas faite.
On peut donc se demander la raison de la différence de traitement entre l'addiction à l'alcool, au tabac ou à la drogue et l'addiction aux jeux d'argent ; la tentation est de répondre que c'est une question de fiscalité qui rapporte à l'Etat mais je ne le pense pas.
Et si l'explication était ailleurs ?
Si, au-delà du souci de remplir les caisses de l’Etat, le but conscient ou inconscient était de nous convertir à la logique financière du capitalisme ? Il y a une grande similitude entre celui qui joue au jeu et celui qui joue en bourse ; l’objectif est le même : l’appât du gain. Qui cautionne l’un, cautionne l’autre. Qui plus est, ces jeux d'argent « valident » les gains indécents de la plupart des hommes d'affaires, des sportifs, des artistes... puisque ces mêmes gains sont à la portée de tous ; ce n'est pas par hasard si dernièrement en Italie une personne a gagné cent quarante six millions d'euros au Loto ; c'est la démonstration que tout le monde peut devenir riche ; il suffit de le vouloir, d'y croire, d’y mettre les moyens et d'un peu de réussite.
Dans le cadre de la refondation du capitalisme, il serait urgent d'interdire la publicité sur les jeux d'argent comme on le fait pour l'alcool ou le tabac et de limiter le montant des gros lots. C'est aussi une question d'éthique.
Je termine par ce témoignage de Philipe Bouvard, passionné de jeu, dans Paris Match du 20.05.10 « il y a une certaine débilité dans le jeu. Ce n’est pas qu’une passion, c’est aussi un vice ».









mercredi 19 mai 2010

Louis Gallois : un patron à cloner


Je voudrais rendre hommage à Louis Gallois patron exemplaire et reprends pour ceci le bel article de Bruno Abescat publié le 03 mai dernier dans l’Express :

« C’est l’anti-patron glouton ; le moine-soldat du CAC 40 ; « l’ascète des étoiles » comme l’a joliment surnommé un jour le Journal du Dimanche.
Louis Gallois, président du groupe européen EADS (la maison mère d’Airbus), va encore alimenter sa réputation d’ascète. Dans un communiqué, la société vient d’annoncer que le président a décidé de renoncer à la part variable de son salaire pour 2009. En l’occurrence, 1,14 million d’euros. Il ne touchera donc que la part fixe de sa rémunération (900 000 euros). C’est la seconde fois que Gallois abandonne la plus grosse part de ses revenus : en 2008 la somme portait sur 1,5 million ! Qu’adviendra-t-il de ces fonds ? Dans un entretien à l’Express, paru le 21 mai 2009, le patron, mystérieux, avait fini par confier qu’il consacrait sa part variable à « un usage socialement utile ». C’est à dire ?
Aujourd’hui encore, on n’en sait pas plus. L’ex-collaborateur de Jean-Pierre Chevènement, le grand serviteur de l’Etat, n’est pas du genre à s’épancher sur ses « bonnes œuvres ». Par ce geste, en tous cas, Gallois détonne dans l’establishment. La plupart de ses pairs n’ont pas autant de scrupules pour encaisser leurs émoluments. Selon une première estimation réalisée par le quotidien Les Echos, les patrons du CAC 40 ont reçu 79,5 millions au titre de 2009. Les trois « hommes de tête » - Franck Riboud (Danone), Bernard Arnault (LVMH) et Jean-Paul HAGON (L’Oréal) – ont respectivement perçu 4,4 ; 3,9 ; et 3,7 millions ! « Ma rémunération me donne des devoirs d’autant plus en période de crise » expliquait encore Gallois à l’Express. L’ancien élève des Pères Jésuites, le « saint patron », qui habite toujours dans le même pavillon de la banlieue parisienne, à Clamart, fait décidément figure d’ovni dans le paysage des affaires.

Dans cet article Bruno Abescat a les mots justes et je crois qu’il est inutile d’en rajouter sinon cette conclusion : Louis Gallois est un magnifique message d’espoir. Eh ! Oui ! Même s’ils sont peu nombreux, il existe vraiment des patrons compétents sans pour autant être soucieux d’amasser pour eux-mêmes le plus possible, des patrons conscients de leurs devoirs civiques – combien de patrons s’expatrient pour ne pas payer d’impôts ? – enfin des patrons respectueux de leur personnel – quel beau geste de respect et de solidarité vis-à-vis de ses salariés que d’abandonner une prime importante en regard des mauvais résultats de son entreprise ! - Cf. billet n° 38 du 16.02.10 « Hautes rémunérations et exemplarité ». Souhaitons que cette « race » de patrons se développe. La démocratie dans l’entreprise serait un excellent moyen de la faire émerger. Nous en avons tant besoin ! Cf. billet n°1 du 23.04.09 « Le patron noté et élu par ses salariés »



mardi 11 mai 2010

Une Europe sans « âme »


Il y a soixante ans, presque jour pour jour, le 09 mai 1950, cinq ans après la fin de la seconde guerre mondiale, Robert Schuman, le ministre français des affaires étrangères, lançait l’appel fondateur de la construction européenne baptisé « déclaration Schuman ». Depuis, malgré les crises successives, cette Europe a bien grandi jusqu’à comporter actuellement 27 pays. La crise grecque a l’avantage de nous inviter à repenser l’Europe.
Pourquoi cette crise ? Pourquoi l’Europe ? Comment l’Europe ?
Fallait-il ou non aider la Grèce au risque de nous plonger à notre tour dans une crise financière ? Fallait-il aider un pays plutôt laxiste sur les dépenses au détriment de ceux qui ont le souci d’une gestion rigoureuse ? On comprend les réticences de l’Allemagne, c’est la fable de la cigale et de la fourmi. Les français comme les européens sont très divisés sur l’aide à apporter à la Grèce et même si nos députés ont fait l’union sacrée pour entériner une aide de 16,8 milliards sur un total de 110 milliards, même si les européens ont fait un plan de 650 milliards d’euros aux Etats en difficulté, ne nous faisons pas d’illusions, derrière cette générosité apparente il y a essentiellement le souci de se protéger contre une dévaluation brutale de l’euro et de mettre un terme à cette descente en enfer. On attribue à cette crise des raisons essentiellement économiques, chaque éditorialiste y va de son analyse et chacun a raison.
Mais si les causes - et par là-même les réponses - étaient ailleurs ? Demandons-nous si cette crise aurait pu arriver aux Etats-Unis ? Certainement pas ! Déjà, pour des raisons techniques, parce qu’il y a un gouvernement fédéral économique, ce qu’il n’y a pas en Europe. Et puis, tout simplement, parce que le lien qui unit les américains est différent de celui qui unit les européens. Les américains ont peu de passé ; leur lien, c’est principalement l’avenir, l’ambition d’avoir une nation forte économiquement, technologiquement, politiquement et dont ils sont à juste titre très fiers ; le très fort attachement au drapeau et à l’hymne américains est significatif et n’a rien à voir avec l’attachement au drapeau et à l’hymne européens qui est souvent faible. A contrario, ce qui unit les européens est essentiellement le passé et un passé lourd de contentieux ce qui fait qu’à la moindre difficulté c’est la tentation du repli sur soi, du retour au nationalisme. La chronique d’Yves de Kerdrel dans le Figaro du 04 mai 2010 intitulée « Charité française, mal ordonnée… » est exemplaire en la matière.
Les américains, eux, sont unis par les Valeurs, la Liberté, la Charité (chaque entreprise américaine a une fondation, Bill Gates est emblématique en la matière) et la Spiritualité ( ce n’est pas par hasard qu’on lit sur chaque billet de dollar « In God we trust» « Nous croyons en Dieu » !). Rien de tout cela chez les européens. A la différence des américains, ce qui unit les européens est une ambition avant tout économique voire financière. Alors, comment voulez-vous que ce sentiment de solidarité, d’appartenance à une nation puisse être présent chez les européens ? Ayons le souci de construire une Europe unie sur les Valeurs, la Spiritualité et ayant l’ambition d’une nouvelle société, en un mot de donner une « âme » à cette Europe.
Le chantier de la refondation du capitalisme pourrait être un grand dessein social pour unir l’Europe. Avec ce ferment on ne se demanderait même plus s’il faut ou non aider la Grèce.
Comme le disait Lacordaire « ne cherche pas à convaincre d’erreur ton adversaire mais à t’unir à lui dans une lumière plus haute ».





mardi 4 mai 2010

Haine du riche ou amour du pauvre ?


L’instauration du bouclier fiscal suscite pas mal de débats, de réactions, de controverses…. Jacques Garello dans un billet paru dans Le Figaro du 23 avril dernier http://www.contribuables.org/actualite/tribunes/bouclier-fiscal-non-a-la-chasse-aux-riches/ y va de son analyse et dénonce la chasse aux riches qu’il appelle « ploutophobie ». Il donne trois explications à la haine des riches.

La première tient à la place séculaire de l’Etat dans la société française.
Or, dans l’inconscient, les riches sont ceux qui ont bénéficié des largesses de la puissance publique et tout riche paraît donc suspect. « Distribuer des privilèges, assurer des rentes, accorder des passe-droits : la méthode est toujours à l’œuvre aujourd’hui. Beaucoup de riches ne doivent leur fortune qu’aux marchés publics, aux finances publiques, aux réglementations publiques, aux entreprises publiques. La « ploutophobie » irait donc de pair avec la « ploutocratie » alliance du pouvoir et de la richesse ».

La deuxième tient à notre tradition : notre fonctionnement.
Par opposition aux pays anglo-saxons, la France n’est pas un pays de marchands et le français a du mal à comprendre que l’on puisse faire fortune au détriment des classes laborieuses et pour lui bâtir sa richesse grâce au marché ou au négoce a quelques chose d’immoral.

La troisième tient à notre culture de l’égalitarisme qui serait une marque de notre tempérament et qui peut être interprétée comme de la jalousie ou de l’envie. Dans son billet, Jacques Garello nous dit « qu’ un dessin célèbre représentait un gros monsieur avec un gros cigare au volant d’une grosse voiture. Réaction de l’américain : « je veux un jour avoir la même voiture » ; celle du français : « je prendrai la place de ce bonhomme ». En France, en effet, nous sommes attachés à l‘égalitarisme et à la solidarité ; ce n’est pas par hasard si nous sommes le pays des droits de l’homme ; par contre, aux Etats-Unis, l’appellation « socialiste » est considérée comme une insulte voire un gros mot.

Et s’il y avait une quatrième raison ?
Si la soi-disant haine des riches était un cri d’amour pour les pauvres, un cri de révolte contre leurs conditions de vie indécentes ? Si cette soi-disant haine des riches était un appel au secours pour une société plus juste, pour que le fossé entre les riches et les pauvres non seulement cesse de se creuser mais se réduise ? Sur notre planète, chaque année, un milliard de personnes sont sous-alimentées et trente millions meurent de faim ; toutes les 6 secondes un enfant meurt de malnutrition ; chez nous cet hiver 2009, les Restos du Cœur ont distribué cent millions de repas - alors qu’à leur création il y a vingt cinq ans ils en distribuaient huit millions - et bon an mal an, crise ou pas crise, leur nombre augmente chaque année de dix pour cent ; un million de personnes n’ont pas de logement ; aujourd’hui, la pauvreté touche même ceux qui travaillent. Tout çà pour dire qu’il n’y a pas de haine des riches mais seulement une révolte contre cette société de plus en plus injuste dans laquelle les uns gaspillent alors que les autres manquent.
La jalousie est un vice bien partagé que l’on retrouve dans toutes les couches sociales. Je ne pense pas que Sœur Emmanuelle, l’Abbé Pierre, Coluche et aujourd’hui Martin Hirsch aient été ou soit animés par la jalousie ; mais leur moteur était et est tout simplement l’amour des pauvres.

Bienvenue !

Le 4 avril 2009 à Londres se sont réunis les chefs d'état des pays les plus riches de la planète : le G20. L'ambition affichée était de refonder le capitalisme (cf. N. Sarkozy). En fait de refondation, nous avons eu droit à un ravalement. On connaissait le bluewashing, le greenwashing, maintenant nous connaissons le whitewashing.
Le G20 a montré du doigt les paradis fiscaux et a remis en question les bonus des patrons. Mais nous l'avons bien compris : rien de fondamental pour le capitalisme dont la pierre angulaire est la loi du plus fort.
Il y a donc urgence à faire émerger des idées concrètes pour refonder le capitalisme et donner de l'espoir à ceux qui se refusent politiquement parlant d'avoir à choisir entre une droite qui fait allégeance complète au capitalisme, une gauche en panne d'imagination et une ultragauche en pleine utopie.
Voilà tout l'objet de ce blog : exprimer des idées, réagir, commenter ...