mercredi 30 septembre 2009

Sommet de Pittsburgh : une petite colline


Le pire, c’est qu’ils sont tous là sur la photo souriants et apparemment fiers des résultats qu’ils ont obtenus ces vingt chefs d’Etat réunis en sommet à Pittsburgh. Pourtant, si l’on en juge à la maigreur des conclusions de ce G20, on est en droit de se demander si leur satisfaction est liée à ces résultats ou au fait de faire la une de la presse mondiale.

Jugez plutôt ; comme on pouvait s’y attendre, pendant ce sommet on a mis l’accent sur les bonus des traders ; on ne les a pas limités comme le demandait la France mais encadrés. La parfaite « langue de bois » qui donne satisfaction à tous. En quoi cette mesure va-t-elle refonder le capitalisme ? On a agi – si l’on peut employer ce mot tellement les mesures sont faibles – sur le conséquences – les bonus des traders – et non sur la cause réelle qui est la spéculation à outrance à laquelle il faudrait mettre des limites.
Est-il normal que l’on puisse vendre ou acheter des actions sans pour autant les posséder ou débourser un centime ? Est-il normal que dans une même journée on puisse faire un aller-retour sur un titre (acheter et vendre ou vice versa) ? Est-il normal que l’on puisse vendre ou acheter des matières premières uniquement pour spéculer sans aucun lien avec sa profession ? Imagine-t-on tous les dégâts collatéraux qu’entraîne cette spéculation ? L’année dernière, la spéculation était tellement forte sur les produits agricoles que la plupart des pays pauvres – faute de pouvoir payer – se sont retrouvés au bord de la famine. Est-il normal que la baril de pétrole puisse passer en trois mois de 40 à 150 dollars ? De quoi déstabiliser l’économie la plus forte ! Est-il normal que l’économie d’un pays puisse être complètement déstabilisée par la spéculation à la baisse sur sa monnaie ? Est-il normal que la Bourse ait complètement dérapé de son objectif premier qu’était le moyen de financer les entreprises ? A ce sujet, je reprends une citation de Claude Bébéar « la spéculation croissante a perverti la fonction même de la Bourse : permettre la rencontre entre les entreprises qui ont besoin d’argent à long terme et les investisseurs qui en ont à placer. Aujourd’hui, toutes les entreprises sont traitées de façon irrationnelle par la Bourse à cause de l’actualité. Certaines peuvent être massacrées dans la journée alors qu’une stratégie se juge sur plusieurs années (…) Il faut avoir le courage de dire non à la dictature des marchés. »

Il existe des moyens de mettre un frein à cette spéculation effrénée : par des lois, des règlements…On pourrait tout simplement prévoir l’instauration d’une taxe dissuasive sur toutes les transactions n’ayant pas un caractère commercial. Il faut savoir que sur l’ensemble des volumes de transactions entre pays, qui sont énormes, 2% sont liés à des opérations purement commerciales – achat ou vente d’un produit ou d’un service – et 98% sont liés à des opérations purement spéculatives.
Mais…veut-on vraiment changer les règles ? Veut-on vraiment refonder le capitalisme ? En a-t-on vraiment le courage politique ? Il est vrai qu’électoralement et médiatiquement parlant, il est plus facile et plus payant de dénoncer ces bonus faramineux que de dénoncer toutes les « ficelles » de la spéculation…

mercredi 23 septembre 2009

Le petit chef… « espèce » encore bien présente



Vingt trois suicides en deux ans chez France Télécom !
Un rapport de la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail nous disait déjà en 2005 qu’un européen sur cinq et 18% des français sont stressés à leur travail. Tout cela est lié à la souffrance au travail qui est en perpétuelle augmentation.

Les causes sont multiples : compétition économique de plus en plus dure, restructurations trop rapides, rythmes insoutenables, suppressions de sites, de postes, d’emplois, mutations abusives, mises sur la touche, promesses de primes non tenues, remontrances perpétuelles, contrôles accrus, inadaptation aux évolutions technologiques...
Les entreprises se donnent les moyens pour combattre ce fléau de la souffrance au travail et des suicides : par l’augmentation du nombre de médecins du travail, la mise en place de personnes de proximité, d’un numéro vert pour contacter un psychologue à l’extérieur de l’entreprise, etc.
Mais bizarrement, dans les causes on ne parle jamais de la relation souvent difficile avec la hiérarchie directe et de sa responsabilité. Celle-ci n’a-t-elle pas un lien permanent avec la personne qui vit ces souffrances au travail ? N’est-elle pas placée en première ligne pour détecter les signes avant-coureurs ou précurseurs qui feraient craindre le pire ? Ces signes sont nombreux : conflits relationnels récurrents, erreurs répétées, repli sur soi, manque d’enthousiasme, lenteur d’exécution, tristesse, absentéisme anormal, etc.
On pourra me rétorquer que le chef n’a pas vocation de « nounou » ! C’est vrai ! Mais il a des devoirs envers ses collaborateurs ; il est à leur service, à leur écoute… Qui, mieux que lui, peut détecter les premiers symptômes ? Qui mieux que lui peut alerter les Ressources Humaines ou autres responsables ? Mais encore faut-il pour ceci qu’il soit formé et qu’il comprenne qu’il n’est pas là seulement pour surveiller et sanctionner mais aussi pour accompagner et faire gagner ses collaborateurs !

Il y a un moyen très simple de détecter ces « petits chefs » et que personnellement j’ai utilisé dans mon entreprise (cf. billet du 23.o4.o9) ; c’est l’évaluation anonyme par les collaborateurs des compétences de leur chef ; cette évaluation porte sur plusieurs critères : la qualité des réunions, la disponibilité, la pédagogie, l’écoute, l’organisation … Cette évaluation permet d’alerter la hiérarchie N+2 et de prendre des mesures pour remédier aux dysfonctionnements identifiés, par des formations ou en adoptant des comportements différents… et cela peut aller jusqu’au remplacement du cadre ; il est vrai que ce n’est pas agréable de se remettre en question et plus facile de remettre en question les autres ! Dans ce domaine, les anglo-saxons ont mis en place des choses intéressantes même si elles sont perfectibles et à adapter ; ainsi, l’évaluation à 360° dans laquelle chaque responsable est évalué par lui-même, par ses collègues, par ses collaborateurs et par sa hiérarchie ; la confrontation de ces quatre ressentis est un formidable outil de développement personnel et de consensus d’équipe.

Dans ces drames que sont la souffrance au travail, les suicides… on ne remet jamais en question la hiérarchie directe. Pourtant cette remise en question de la hiérarchie directe par l’évaluation est une piste très intéressante pour mettre un frein à ces souffrances au travail et elle s’inscrit parfaitement dans la refondation du capitalisme.

mercredi 16 septembre 2009

Evasion fiscale : fraude ou bonne gestion ?


Le Ministère des finances est parti en chasse contre les fraudeurs du fisc. On estime à 3 milliards d'euros le montant des comptes déposés illicitement dans les banques étrangères. On ne peut qu'approuver cette initiative qui va dans le sens du souci de plus d'équité et du respect de la loi.
Mais quelle est la différence entre celui qui va déposer de l'argent en Suisse ou ailleurs pour échapper à l'impôt et l'entreprise qui, en toute légalité, ouvre une société offshore et par le biais d'opérations internes échappe au paiement d'impôt ? Nos grandes sociétés françaises ne se privent d’ailleurs pas de cet avantage… Aucune différence sinon que dans le premier cas on est dans l'illégalité la plus complète et dans le deuxième on est parfaitement en règle avec le droit français et international.
Bien que n'ayant pas de chiffres pour confirmer mes dires, je pense que la fraude fiscale ne doit représenter que 1% de la fraude légale ; un célèbre chanteur français a en toute légalité élu domicile en Suisse pour ne pas payer d'impôt en France. Manifestement, c'est contre ces pratiques douteuses qu'il faut lutter. Voilà un des sujets qu'on pourrait aborder au prochain G 2O sachant qu'à ce niveau, pour être efficace, une décision doit être appliquée par tous.
« Les Echos » du 28 août dernier rapportent une interview de Jérôme Monod (1) qui va dans ce sens «les évènements redonnent du sens à un vocable qui était autrefois l'apanage du parti communiste : la financiarisation des entreprises, l'attention portée à la qualité des métiers, au bien commun des clients disparaît au détriment de quelques ratios financiers. L'économie n'intègre plus d'autres valeurs que la spéculation, le gain, l'accaparement. C'est la porte ouverte à la violence, la corruption, la mafia.» Et lorsqu'on lui demande comment éviter ces abus voilà ce qu'il répond : «d'abord, il faut des institutions financières mais aussi économiques, sociales, morales pour édicter des règles claires et les faire respecter, sur un socle solide, fondé par le pouvoir politique sur les principes du bien commun – qui ne coïncide pas forcément avec ce que propose le Medef, trop soumis aux pressions de ses mandants, adeptes de la pratique du compromis...».
Voilà des pistes intéressantes pour refonder le capitalisme...

(1) Haut fonctionnaire devenu patron d'un grand groupe français (qui devenu la Lyonnaise des eaux) avant de tenir un rôle clef à l'Elysée

mercredi 9 septembre 2009

Les traders, boucs émissaires de la crise



Il nous fallait trouver des coupables pour expliquer cette crise financière. On les a trouvés : ce sont les traders et leurs bonus indécents.
La France s'apprête à prendre des sanctions : désormais les malus liés à leurs opérations déficitaires seront déduits de leurs bonus, et le solde de leurs bonus sera versé avec un différé de trois ans. Voilà une de ses propositions au prochain sommet du G2O qui se tiendra à Pittsburgh aux USA fin septembre ; mesure «phare» pour moraliser le capitalisme ; on croit rêver ! Soyons sérieux !
D'abord, les traders sont des salariés payés pour spéculer (1) et ils spéculent ; mais certains plus doués – ou plus chanceux - que d'autres font des gains plus importants et de ce fait ont des bonus plus importants ; je ne vois pas en quoi ils sont responsables de la crise ; ils en sont seulement les instruments !
La France va donc proposer d'instaurer des malus ; mais n'a-ton pas réinventé l'eau chaude ? Le système des malus existe déjà depuis longtemps ; dans toutes les entreprises, la plupart des salariés, surtout les commerciaux, sont réménurés sous deux formes : avec une partie fixe qu'on appelle le salaire de base et une partie variable qu'on appelle primes ou commissions ; tout naturellement, lorsque par exemple une commande prise par un commercial est annulée les commissions imputées à cette commande seront déduites de ses commissions ; il n' y a rien de plus normal.
Mais, là où les choses se «corsent» pour les traders, c'est dans l'énormité de leurs bonus, surtout lorsque l'Etat aide financièrement la banque pour laquelle ils travaillent ! Dans ce cas, la réponse paraît toute simple : au prochain sommet du G2O, convenons de réduire le pourcentage des bonus des traders et de les faire appliquer par tous les pays.
Par contre, là où il y a un véritable scandale - et dont on parle depuis longtemps - c'est la rémunération exhorbitante des patrons. Est-il normal que la moyenne des salaires des patrons du CAC 4O soit de plus de 2 OOO OOO d'euros sans parler des avantages annexes, stock options ... ? Certains patrons vous diront «mais on prend des risques et on ne gagne pas à tous les coups ! » ; il est vrai que quelques fois les résultats ne sont pas au rendez-vous et que les primes sautent ; mais compte tenu des salaires de base énormes qui eux ne sont pas touchés cela ne va pas trop nous faire pleurer...
Alors, pourquoi dans le cadre de la future réunion du G2O ne se mettrait-on pas d'accord sur un salaire de base annuel maximum (5OO OOO euros par exemple) assorti d'avantages liés aux résultats ? Le résultat sera peut-être le même mais la forme plus logique et plus décente.
Je terminerai ce billet en évoquant un autre scandale en terme de rémunération ; il est lié aux «jetons de présence». Pourquoi une personne peut-elle siéger dans plusieurs conseils d'administration et percevoir des «jetons de présence» conséquents et cela quels que soient les résultats de la société ? Dans le cadre de la refondation du capitalisme il y a certainemet un sérieux dépoussiérage à faire dans la législation des sociétés côtées en Bourse...
Toutes ces anomalies ne sont que les conséquences du dérapage d'un système dans lequel la finance est la finalité et l 'homme un moyen.

(1) spéculer : acheter des titres à leur cours le plus bas possible dans l'espoir de les revendre plus tard à leur cours le plus haut possible pour réaliser une plus value et vice versa

mercredi 2 septembre 2009

Relations avec les pays en voie de développement : intérêt, charité ou solidarité ?



Le rapport Brundtland du 31.12.1987 nous donne la définition du développement durable : «un développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre les capacités des générations futures de répondre aux leurs». A travers cette définition nous comprenons que la répartition équitable des richesses et des ressources de la planète est de loin par importance le premier enjeu du développement durable : un défi que les pays riches se doivent de relever. Enjeu beaucoup plus urgent à régler que le réchauffement climatique ou l'éradication des espèces, n'en déplaise aux écologistes «intégristes» ! Toutes les cinq secondes un enfant meurt de faim...
Alors, que faire pour une meilleure répartition des richesses et des ressources ?
Au premier sommet de la terre à Rio, en 1992, les pays riches s'étaient engagés à donner 0,7% de leur PIB pour aider les pays en voie de développement ; dix sept ans après, le constat est lamentable : nous ne dépassons pas les 0,4% ! Soit une tasse de café par personne et par semaine. La France, le pays des droits de l'homme, en est à 0,38% et encore en incluant les allègements de dettes consentis aux pays les plus pauvres !
On peut se demander le pourquoi de ce peu d'empressement à tenir cet engagement : tout simplement le manque de motivation.
Dans mon dernier billet, je demandais le pourcentage de la part d'intérêt personnel, de charité, de solidarité dans l'aide aux pays pauvres ; les faits confirment mon ressenti :
80 % de l'aide sont liés à des intérêts financiers en terme de retour sur investissement ; ce n'est pas par hasard si chinois, américains, européens... s'intéressent autant à l'Afrique qui, dans son sol, possède des richesses inestimables (pétrole, uranium, caoutchouc, phosphate, etc.). 10% de cette aide sont motivés par la charité au sens restrictif du terme, par souci de se donner bonne conscience à gaspiller et à justifier les écarts indécents entre les plus pauvres et les plus riches. Les 10% restant sont liés à la solidarité bien comprise au-delà des différences politiques, religieuses, ethniques …. C'est dans cette catégorie que nous retrouvons les grands humanistes, les ONG...
Si, à l'occasion d'une élection, un parti politique proposait dans son programme de doubler l'aide aux pays en voie de développement, je me demande si cette mesure aurait grand succès ! Il est vrai qu'on parle beaucoup de corruption en Afrique et ailleurs... et que c'est un alibi facile pour ne pas aider les pays pauvres ; mais qui dit corruption dit corrupteurs et corrompus ; les corrompus, on les connaît, ce sont la plupart des dirigeants africains et leur staff dont les caisses sont pleines dans les paradis fiscaux ; mais les corrupteurs, on en parle beaucoup moins … Ce sont les multinationales voire les Etats qui achètent des concessions à prix d'or (armement, aide militaire, sommes occultes...) pour exploiter les matières premières de ces pays qui vont jusqu'à l'expropriation sans contre partie des petits paysans ; sommes dont les habitants ne profitent d'ailleurs jamais !
Des solutions, il en existe, et encore une fois, c'est l'objet de ce blog que de donner des pistes pour refonder le capitalisme.
Payer les matières premières à leur juste prix en faisant un mixte entre l'économie de marché et l'esprit du commerce équitable en imaginant pour chaque matière première y compris le pétrole et les devises principales (dollars, euros) un prix plafond et un prix plancher qui permettrait à chaque pays d'avoir en retour de ses richesses un niveau de vie décent et, qui plus est, serait un frein à la spéculation.
Autre proposition : obliger chaque multinationale exploitant ces matières premières à en manufacturer sur place un pourcentage variant suivant les matières premières et les données économiques ; je ne vois pas ce qui empêcherait Michelin ou Firestone de fabriquer des pneus au Libéria dont le taux de chômage est de 80% ! ...
Tout ceci peut paraître bien compliqué mais aurait-on imaginé seulement vingt ans en arrière qu'on puisse fixer à chaque entreprise un quota d'émission de CO2 à ne pas dépasser ? Et pourtant, on le fait et on le contrôle ! Mais la motivation est au rendez-vous ! Ce qui est loin d'être le cas pour l'aide aux pays pauvres qui ne rentre pas dans la logique du capitalisme tel qu'il est vécu aujourd'hui !

Bienvenue !

Le 4 avril 2009 à Londres se sont réunis les chefs d'état des pays les plus riches de la planète : le G20. L'ambition affichée était de refonder le capitalisme (cf. N. Sarkozy). En fait de refondation, nous avons eu droit à un ravalement. On connaissait le bluewashing, le greenwashing, maintenant nous connaissons le whitewashing.
Le G20 a montré du doigt les paradis fiscaux et a remis en question les bonus des patrons. Mais nous l'avons bien compris : rien de fondamental pour le capitalisme dont la pierre angulaire est la loi du plus fort.
Il y a donc urgence à faire émerger des idées concrètes pour refonder le capitalisme et donner de l'espoir à ceux qui se refusent politiquement parlant d'avoir à choisir entre une droite qui fait allégeance complète au capitalisme, une gauche en panne d'imagination et une ultragauche en pleine utopie.
Voilà tout l'objet de ce blog : exprimer des idées, réagir, commenter ...